• Introduction du commentaire de texte : un corrigé type.

    Corrigé type (proposition) de l’introduction du commentaire de texte de Rousseau extrait du Contrat social, livre I chapitre 3 « Du droit du plus fort »

        Il n'est pas rare d'entendre, pour justifier une injustice ou un pouvoir pris illégitimement sur quelqu'un ou sur quelque chose, qu'il s'agit de la « loi du plus fort ». Il n'y aurait ici rien à objecter. Cette référence à la loi du plus fort semble tirer son apparente légitimité de l'idée selon laquelle une telle loi serait la règle première régissant les rapports entre les différents êtres dans le règne animal. De «c'est ainsi dans la nature », nous passons insensiblement à la déclaration « c'est naturel », pour finir par affirmer « c'est normal ». Nous affirmons ainsi non seulement que la force souvent fait la loi mais en plus que la force peut avoir force de norme, fondant ainsi le droit sur la force.

       Jean-Jacques Rousseau, dans son livre Du contrat social, intitule le chapitre 3 du livre I « Du droit du plus fort » et s’interroge sur cette expression et sur son apparente légitimité. Remarquons tout d’abord que c’est l’idée de « droit du plus fort » qu’il questionne et non celle de « loi du fort ». En effet, alors qu’on peut accepter le fait qu’il existe une loi du plus fort dans la nature comme l’indiquent les études d’éthologie, Rousseau se demande si un simple fait peut faire droit et s’il est légitime de fonder le droit sur la nature. Peut-on ainsi accepter la force du plus fort et reconnaître que ce qui est doit être nécessairement érigé en modèle pour penser ce qui doit être. 

        En d’autres termes, Rousseau pose le problème du fondement du droit et de ce qui pourrait bien être des lois et une société justes en se demandant : Peut-on fonder le droit sur la force ?

     

     

      Le texte commenté : Rousseau extrait du Contrat social, livre I chapitre 3 « Du droit du plus fort » 

      « Le plus fort n'est jamais assez fort pour être toujours le maître, s'il ne transforme sa force en droit, et l'obéissance en devoir. De là le droit du plus fort; droit pris ironiquement en apparence, et réellement établi en principe. Mais ne nous expliquera-t-on jamais ce mot ? La force est une puissance physique; je ne vois point quelle moralité peut résulter de ses effets. Céder à la force est un acte de nécessité, non de volonté; c'est tout au plus un acte de prudence. En quel sens pourra-ce être un devoir ?

    Supposons un moment ce prétendu droit. Je dis qu'il n'en résulte qu'un galimatias inexplicable; car, sitôt que c'est la force qui fait le droit, l'effet change avec la cause: toute force qui surmonte la première succède à son droit. Sitôt qu'on peut désobéir impunément, on le peut légitimement; et, puisque le plus fort a toujours raison, il ne s'agit que de faire en sorte qu'on soit le plus fort. Or, qu'est-ce qu'un droit qui périt quand la force cesse? S'il faut obéir par force, on n'a pas besoin d'obéir par devoir; et si l'on n'est plus forcé d'obéir, on n'y est plus obligé. On voit donc que ce mot de droit n'ajoute rien à la force; il ne signifie ici rien du tout. (…)

    Convenons donc que force ne fait pas droit, et qu'on n'est obligé d'obéir qu'aux puissances légitimes. Ainsi ma question primitive revient toujours. »